jeudi 28 mai 2015

(Rapp)port du voile intégral

Non, les rapports d’inspection ne sont pas toujours destinés à être oubliés sur une étagère. Prenez le rapport de l’inspection générale de l’Éducation nationale présenté par Jean-Pierre Obin en juin 2004. Son titre, « Les signes et manifestations d’appartenance religieuse dans les établissements scolaires », dit assez qu’il reste d’actualité en 2015.

Ses auteurs* étaient parfaitement conscients de l’importance de leurs constats. Les comportements notés à l’école n’étaient selon eux « que la partie scolairement visible d’un phénomène bien plus profond, dont l’évolution constitue vraisemblablement l’une des clés de notre avenir ». Une des clés de notre avenir… Pas une mince affaire, donc.

Qu’avaient-ils donc découvert ? De leurs visites à des « établissements scolaires implantés dans les quartiers où sont concentrées des populations issues de l’immigration maghrébine, parfois turque, africaine ou comorienne, quartiers de plus en plus homogènes sur le plan social et religieux », ils avaient conclu que des « évolutions inquiétantes » étaient en cours : massivement, des jeunes « de la seconde ou troisième génération » trouvaient dans l’islam une « identité de substitution » et rejoignaient des « groupes ouvertement ségrégationnistes et qui dénoncent l’intégration comme une apostasie ou une oppression » visant à « rassembler ces populations sur le plan politique en les dissociant de la nation française et en les agrégeant à une vaste « nation musulmane ».

Ce n’était pas rien ! Où cela pouvait-il mener ? À l’engagement dans des milices islamiques lors de conflits à l’étranger ? À des assassinats de journalistes coupables de blasphème envers l’islam ? Sait-on jamais… En tout cas, on ne pouvait qu’adhérer : ce qui se passait alors dans les établissements scolaires était « la clé de notre avenir ». Heureusement, il était possible d’y faire quelque chose puisque « certains établissements, objectivement parmi les plus exposés, ont su traiter avec une remarquable efficacité les tentatives dont ils ont été l’objet ».

Le rapport aura onze ans dans quelques jours. Qu’a fait notre génération de ce cri d’alarme ? Pas grand chose. Nous laissons ce soin à nos enfants. Qui devront aussi surveiller du coin de l’œil les dizaines de milliers d’élèves que nous avons laissés se radicaliser. Ou même subir les conséquences de leurs actes.
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* Dix inspecteurs généraux de l’Éducation nationale, pour la plupart baby-boomers : outre Jean-Pierre Obin, Nicole Baldet, Jean-Yves Cerfontaine, Jean-Paul Delahaye, Jean-Marie Jutant, Claude Lambert, Gérard Mamou, Gérard Pourchet, Claude Roiron et Martine Storti. Aucun n’était suspect de sympathies pour le Front national. Au moins sept d’entre eux ont même appartenu au cabinet de ministres socialistes comme Jacques Lang ou Vincent Peillon ; Nicole Baldet a été secrétaire de Lionel Jospin et Claude Roiron secrétaire nationale du Parti socialiste.

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