lundi 28 septembre 2015

La mort de la culture subventionnée façon baby-boomers

L’ère des baby-boomers aura aussi été celle de la culture subventionnée. En mai 1968, les plus cultureux d’entre nous se sont insurgés contre l’influence de l’argent dans l’art. C’était pour mieux en réclamer, de l’argent ! Et cela a fonctionné : depuis lors, l’arbitre des valeurs esthétiques n’est plus le lecteur, le spectateur ou l’auditeur : c’est la puissance publique, via les subventions de l’État et/ou des collectivités locales. Ce qui favorise bien sûr les copinages, (et pas les grandes œuvres, comme je le signale dans Ils viendront cracher sur nos tombes).

Le metteur en scène Thibaud Croisy a publié dans Le Monde au mois de juillet une tribune éloquente. Son titre à lui seul raconte l’essentiel : « Le conservatisme du théâtre public freine l’émergence de nouveaux talents ». Son constat : « il suffit de passer au crible les différentes brochures de saison pour s’apercevoir que c’est souvent la même poignée d’artistes qui est produite, accueillie et diffusée par les théâtres nationaux, les centres dramatiques et les structures parisiennes ». Sa question : « comment faire pour déverrouiller et diversifier les programmations du théâtre public et pour que les jeunes n’y figurent pas en tant que simple caution ou produit du moment ? » Sa préconisation : « procéder à un rééquilibrage générationnel et à des ajustements structurels ».

Le « rééquilibrage générationnel » n’a l’air de rien comme ça, mais sous la plume d’un jeune metteur en scène, ça ressemble assez à : « Dehors les sexagénaires ! ». Avec quelles conséquences ? Comme beaucoup de ses collègues, Thibaud Croisy déplore le déclin des budgets publics. Mais voit-il bien que c’est une conséquence du déséquilibre générationnel ? Au fur et à mesure que la part des baby-boomers parmi les bénéficiaires se réduit, l’État donne moins. Comme si seule notre génération était digne d’être subventionnée ! Ce qui laisse les suivantes démunies : à force d’habituer la culture à vivre de subventions, nous quittons la scène en laissant derrière nous un champ de ruines.

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Pamphlet interdit aux moins de 60 ans
Nous autres, enfants gâtés du baby-boom et éternels ados de mai 68, nous avons mangé notre pain blanc et nous mangeons à présent celui de nos enfants. Démographie, économie, fiscalité, urbanisme, éducation, sécurité, énergie, immigration… : nous avons presque tout raté. Et le plus souvent, nous avions toutes les informations en main pour savoir que ça allait rater : nous sommes allés dans le mur en klaxonnant. Ce pamphlet qui vient de paraître chez Chapitre.com nous invite à une réflexion sur nos œuvres. La nostalgie n’est pas ce que nous aimerions qu’elle fût !
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